TROISIEME DIMANCHE DE CAREME ANNEE: B

(Ex 20, 1 – 17 ; Ps – 18 (19), 8-9. 10-11 ; 1 Cor 1, 22-25 ; Jn 2, 13-25)

Pour avoir beaucoup étudié votre catéchisme dans le temps, je pense que vous connaissez tous vos dix commandements par cœur. Nous allons en parler ce matin.

Le décalogue existe en trois versions. Deux dans la bible et une dans le catéchisme de l’église catholique (les fameux dix commandements). Ce matin nous aurons la première version  porteuse de profond sens spirituel et humain. C’est celui écrit dans le contexte de l’alliance au Sinaï.

Dans le passage que nous entendons aujourd’hui, les paroles de Dieu sont majoritairement négatives. Nous avons seulement deux paroles positives : le respect du sabbat, du Père et de la mère. Or, donner un commandement négatif, c’est interdire un certain nombre de choses, globalement un certain nombre d’attitudes et de comportements qui mènent à la mort ou à l’esclavage. Ces commandements induisent le champ des possibles qui est délimité par les sens interdits. Les commandements bibliques délimitent donc un espace dans lequel nous pouvons inventer notre chemin. Alors qu’avec des commandements entièrement positifs, nous avons à faire un certain nombre de prestations. Nous sommes mis sur des rails, nous sommes d’une certaine manière contraint à suivre le chemin qu’on nous a fixé. En cela, l’expression négative des commandements est beaucoup plus ouverte à une invention libre de notre propre existence au regard de Dieu que les commandements positifs qui contraignent le croyant à vivre de tel ou tel manière.

Soulignons tout de même que la première parole de Dieu n’est pas un commandement. Il se présente à chacun de nous comme un interlocuteur « Je suis le SEIGNEUR ton Dieu,
qui t’ai fait sortir du pays d’Egypte, de la maison d’esclavage »,
autrement dit, c’est un Dieu qui se présente lui-même comme un « Je » face à un « Tu ». Nous sommes dans un dialogue qui est typique du cadre de l’alliance. Ce sont des paroles qui sont données pour qu’Israël sache comment s’y comporter. Un « Je » qui s’adresse à un « Tu » mais un « je » qui affirme aussi qu’il a mis ce « tu » en position de liberté : « Je suis le SEIGNEUR ton Dieu,  qui t’ai fait sortir du pays d’Egypte, de la maison d’esclave ». C’est un Dieu qui s’adresse à un humain libre, il va susciter sa responsabilité et sa liberté à travers les différentes paroles qu’il va lui proposer. Donner une loi à quelqu’un qui est libre, c’est susciter son autonomie dans les choix qui vont être porteur pour lui. En revanche, si nous n’avons pas cette parole, nous risquons d’avoir une loi d’esclavage : on donne une loi à des gens qui vont être contraint. Dans notre texte d’aujourd’hui, nous avons une loi qui ouvre à la liberté : chacune et chacun peut la  reprendre en son compte.

Ce n’est pas un hasard que la première parole insiste sur le fait de sortir le peuple d’Egypte. L’Egypte, c’est le lieu où le peuple est esclave, où il ne maîtrise pas son avenir, il ne profite pas de son travail, il n’a pas la liberté de ses choix, autrement dit nous sommes devant un Dieu qui nous sort de l’esclavage et qui nous donne une loi pour pouvoir mettre en œuvre la liberté reçue. Un autre élément important, c’est la vie. Le pharaon par peur de son peuple organise une sorte de génocide en faisant tuer les nouveau-nés (petits garçons). Nous voyons là qu’Israël est menacé de mort en plus de son esclavage. Le faire sortir d’Egypte, c’est lui donner la vie et la liberté. Les dix  paroles sont là pour qu’Israël puisse assumer en première personne sa responsabilité de vivre cette liberté,  cette vie que Dieu lui a donné.

 Ce sont des paroles qui nous sont destinées pour accompagner notre libération permanente. C’est une manière très sage de voir les choses ainsi. On n’est jamais libéré une fois pour toute ! On ne choisit jamais la vie une fois pour toute ! D’une certaine manière c’est dans les actes quotidiens qu’on opte pour une attitude, un comportement d’homme et de femme qui cherchent la liberté ou au contraire quelqu’un qui retournera à l’esclavage. D’une certaine manière c’est une loi de libération permanente qui permet que l’acte initial de Dieu (le baptême) pour le croyant et (la sortie d’Egypte) pour Israël puisse être actualisé au jour le jour en évitant un certain nombre de piège qui nous mettrait en esclavage. C’est un texte qui ne nous impose rien. Il parle de liberté et de libération à travers notre agir. Il ne peut pas entraver la liberté, même la liberté de penser. C’est un texte à redécouvrir parce qu’il est recouvert par la poussière. Il met le doigt sur ce qui empêche l’être humain d’aller vers son épanouissement véritable ou de manifester qu’il est un être humain libéré par Dieu.

Le temps du carême est  un temps pour découvrir la richesse et la beauté de ce temple qu’est la Bible, la Parole de Dieu, le commandement du Seigneur. Il y a à détruire et à construire dans toute vie. Quand on s’en rend compte, on s’aperçoit que 40 jours c’est bien peu et qu’une vie n’est peut-être pas suffisante. Mais, quel que soit le temple que l’on édifie, rappelons-nous que la pierre angulaire en est le Christ, mort et ressuscité  pour nous. Que la grâce de Dieu nous accompagne tout au long de ce carême. Amen !

Pierre SONTE, prêtre.

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