MESSE DE LA SAINTE FAMILLE

(Gn 15, 1 – 6 ; 21, 1 – 3 ; Ps – 104 (105) He 11, 8. 11-12. 17-19 ; Lc 2, 22 – 40)

Frères et sœurs,

 Après la naissance de Jésus, Marie et Joseph accomplissent le rite de consécration des premiers-nés prescrit par la Torah. Cette coutume s’inscrit dans les lois des prémices qui consistent à offrir à Dieu la première part de ses récoltes, de ses troupeaux, de ses enfants. Offrir à Dieu la première part est le signe que nous reconnaissons que tout ce que nous possédons vient de lui. Consacrer son premier-né est une façon d’inscrire l’ensemble de sa famille sous le regard de Dieu.

Marie et Joseph rencontrent à l’entrée du temple un juste appelé Syméon. Selon la tradition biblique, Syméon est le nom du deuxième fils de Jacob qui signifie : « Dieu a entendu ou Dieu a écouté ». Parce que  Syméon était un homme d’écoute, « l’Esprit saint était sur lui ». Ce qui qualifie la foi, ce n’est pas tant la certitude que l’écoute comme l’a dit Paul dans l’épître aux Romains : « La foi vient de ce qu’on entend » (Rm 10.17). Certes pour écouter, il faut croire qu’il y a quelque chose à entendre, mais il faut aussi reconnaître qu’on ne sait pas tout, qu’on a encore beaucoup à apprendre. Syméon n’était pas juste et pieux parce qu’il savait tout, mais parce qu’il n’a pas cessé d’écouter. Du coup, quand il a vu le bébé Jésus dans les bras de ses parents, il ne s’est pas trompé : il a su.

Syméon et Anne n’ont pas eu besoin de la visite particulière d’un ange, ils ont su dès qu’ils ont vu. Une foi accomplie ne repose pas sur des signes spectaculaires, c’est un travail sur soi qui  nous fait voir le monde et les gens comme Dieu les voient.

Dans un de ses livres, Christiane Singer raconte : « Certaines rencontres sont inoubliables – ce vieil homme dans un train qui, lorsque j’avais quinze ans peut-être, me mit sur le gril en me racontant qui j’étais, avec une exactitude presque insoutenable. ″Comment savez-vous tout cela ?″ lui demandai-je en torturant les franges de mon châle. Et lui avec un sourire amène : ″Mais, mademoiselle ! Vous voyez bien que je suis vieux !″ ». « Ce qu’un vieillard assis voit de loin, le jeune homme débout ne le voit pas » nous dit la sagesse africaine.

Frères et Sœurs, fêter la Sainte Famille, c’est se réjouir que Jésus ait pu grandir auprès de parents unis, au milieu de l’amour. C’est aussi chercher ce que nous pouvons faire pour que, dans nos familles, il y ait plus d’amour à l’intérieur, plus de foi en Dieu et plus d’amour envers les autres. « Jésus grandissait et se fortifiait, rempli de sagesse et la grâce de Dieu était sur lui ». Comment pouvons-nous aujourd’hui à notre tour, parler d’un futur radieux à nos jeunes ?

C’est un peu angoissant pour les parents. Le futur aujourd’hui paraît catastrophique. Parce que d’une période à une autre, ce que l’on construit est détruit. Les êtres que l’on aime s’en vont et la jeunesse passe tellement vite parce que nous sommes vite abîmés dans la violence et la terreur du monde. Au cœur de ces batailles et de ces périodes si douloureuses certains se lèvent et aiment imaginer que la vie va leur ouvrir la porte d’un monde meilleur et qu’ils vont se battre pour cela. Je crois que notre jeunesse a besoin de découvrir le sens et la richesse de la traversée qu’ils auront à faire pour aller au-delà de ce monde qui fait du bruit et rencontrer aux plus intimes d’eux-mêmes le maître de la vie : Jésus. Ils ont une chance incroyable. Ils vont se poser la question de la place de l’homme sur la planète mais avec le gout de la vie alors que notre génération et celle qui nous précède avaient le gout de l’éternité. Nous n’avions pas d’éphémère à protéger. C’est une période parmi tant d’autres. Cette période  peut révéler quelque chose de merveilleux à condition de la porter dans son cœur, comme Marie.

Frères et sœurs, la Sainte Famille a connu des moments de joie et de tristesse. En cette période de crise sanitaire, nos familles connaissent des moments d’allégresse mais aussi des périodes moins reluisantes.

Ce matin, je voudrais apporter tout mon soutien à toutes les personnes qui ont eu le COVID et qui ont mal vécu l’après COVID. C’est une expérience culpabilisante parce que si vous l’avez, l’on dira que  vous n’avez pas fait ce qu’il fallait. Il y a aussi l’isolement qui pour certains est vraiment douloureux. Et quand ils se trouvent en plus à être dans la famille, on se rend compte de toutes les difficultés qu’il y a pour les parents à ne pas embrasser son enfant. C’est une expérience éprouvante. Ensuite, après l’avoir traversé si les autres vous considèrent comme un pestiféré, en ce moment tout devient une épreuve insoutenable. Il y a une frénésie, une peur incontrôlée qui est pire que le COVID et qui fait regarder celui qui a commis  l’erreur de baisser son masque comme un indigne de confiance. Celui qui a contracté la maladie est considéré comme celui qui a péché. On le regarde comme une future bombe.

Essayons de regarder un peu la peur qui navigue en nous et commencer à se dire que derrière le COVID il y a nos peurs. Quand l’un d’entre nous a eu le COVID et qu’il en sort, bénissons Dieu, soyons sympathique avec lui. Que Dieu tout puissant bénisse nos familles, maintenant et pour les siècles de siècles. Amen.

Pierre SONTE, prêtre.

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