CINQUIEME DIMANCHE DU TEMPS PASCAL

(Ac. 6, 1-7 ; Ps – 32 (33) ; 1P. 2, 4-9 ; Jn 14, 1-12)

Mes sœurs et mes Frères, Nous connaissons tous la première communauté de disciples du livre des Actes des Apôtres comme une communauté de croyants unis dans la louange et mettant tous leurs biens en commun (Actes 2, 42-47). Aujourd’hui, dans le passage que nous lisons, cette communauté va connaitre sa première crise de croissance. Les Apôtres eux-mêmes travaillaient à la propagation de l’évangile, à son développement donc, à l’accroissement du nombre de disciples. Il est alors logique que le nombre de membres de la communauté augmente. Quand la quantité augmente, des problèmes nouveaux se présentent. Quantité de temps, « en ces jours-là », quantité du nombre, « les disciples se multipliant ». Cette crise de croissance est montrée par le murmure, la jalousie parce que les veuves grecques sont négligées dans la distribution de vivres qui se fait tous les jours. Visiblement, la réussite elle aussi a son lot de problèmes.
Cependant, dès que la quantité augmente, pour que la qualité ne disparaisse pas, il est nécessaire qu’il y ait un ordre. Il faut ordonner cette quantité pour que la finalité soit respectée. La finalité pour les apôtres, c’est la parole de Dieu. « Recherchez donc parmi vous, frères, sept hommes de qui l’on rende un bon témoignage, remplis d’Esprit et de sagesse, que nous préposerons à cet office ; pour nous, nous serons assidus à la prière et au service de la Parole » (Ac 6, 4).
Nous ne devons pas avoir peur, de toute crise, naît une nouvelle fécondité. Nous avons vu nombre de crises analogues, et nous avons le droit de répéter ici la parole de l’Ecclésiaste : « Il n’y a rien de nouveau sous le soleil. » Maintes fois l’exercice de la charité a donné lieu aux manifestations les moins charitables. L’histoire de l’Eglise primitive, encore placée sous les bénédictions de la Pentecôte, peut nous être, à ce propos, d’un réel encouragement. Elle a traversé sans s’affaiblir cette épreuve redoutable. Conduite par l’Esprit-Saint, obéissant à ses ordres, elle s’est fortifiée au contraire, en se donnant une institution de service dont les bienfaits se font sentir jusqu’à nous. A suivre le même guide, nous serons sûrs de ne pas périr en chemin. Inspirons-nous en pour notre gouverne personnelle, pour nos relations familiales et notre communauté paroissiale.
Ici, il ne s’agirait que d’une question d’organisation, et, plus particulièrement, d’un manque de main d’œuvre. Aucune accusation n’est portée contre ceux qui font des différences, pourtant, le texte parle bien de négligence. Mais cela ne sert à rien d’accuser les uns ou les autres.

L’accusation ne peut qu’aggraver les tensions déjà existantes, et ce n’est pas forcément en cherchant des responsables que l’on va résoudre les problèmes. Il y a une différence entre accuser et chercher les causes de la difficulté. Pour résoudre un conflit, il faut pouvoir poser le problème sans passion. Encore qu’un rappel du commandement d’amour peut toujours nous aider.
A question pratique, réponse pratique. Cette solution peut sembler évidente ; elle ne l’est pas forcément, car, le partage (même des tâches matérielles) implique, de la part de celui qui délègue, une perte de responsabilité, et donc de pouvoir. Combien de chefs s’occupent de tous les domaines de leur communauté, afin que rien ne leur échappe. Et si cela est vrai dans le domaine matériel, ça l’est d’autant plus sur le plan spirituel. La frontière entre les deux n’est d’ailleurs pas toujours nette, la suite du texte en témoigne.
Une saine gestion de la communauté passe par le partage. Il n’est pas bon qu’une seule personne assume l’ensemble des responsabilités. Pour des raisons d’efficacité, déjà ; et pour éviter au responsable de se prendre pour un Dieu. Mais, là encore, le partage est quelque chose qui ne se contrôle pas totalement. Les apôtres ont cru partager une part de leurs responsabilités, en l’occurrence, l’aspect pratique, mais, en fait, tout a été partagé, la charge spirituelle aussi.
C’est une invitation à ne rien retenir pour soi, à donner de soi-même, à partager vraiment, même si, comme dans le cas présent, ce partage a suscité, avec les énergies nouvelles, des points de vue divergents. Mais il y a plusieurs demeures dans la maison du Père. Jésus nous invite à partager sa maison, même si nous n’avons pas tous les mêmes conceptions. Le partage est un risque, c’est vrai ! Il semble plus sécurisant d’assumer toutes les responsabilités, mais beaucoup moins intéressant. Le Christ a toujours assumé ce risque du partage. Soyons ses disciples, aussi en ce sens.
Que la grâce de Dieu nous soutienne…

PIERRE SONTE, CURE

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